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Par
jojo 791 le
12 Août 2017 à 16:45
Vengeance : 2009
JOHNNY HALLYDAY / FRANCIS COSTELLO
L'as du polar chorégraphique a cette fois convoqué un autre Johnny, Hallyday. Le personnage qu'il joue lui ressemble : un type déphasé, venu d'ailleurs, un cuisinier français qui débarque à Macao pour venger sa fille. Il s'appelle Costello — comme Alain Delon dans Le Samouraï — et engage un trio de maestros de la gâchette pour liquider les coupables mafieux. Quand Johnny se prend une méchante bastos, ses compagnons le placent aussi sec sur le billard pour extraire la balle. C'est dire si To travaille le chanteur au corps. Et au visage : avec son regard bleu laser, ses silences et ses sentences d'un autre âge, Johnny ressemble à un mutant.
Résumé : Un père vient à Hong Kong pour venger sa fille, victime de tueurs à gages. Sur son passeport est marqué "cuisinier". 20 ans plus tôt, il était un tueur professionnel. Rongé par la haine, Francis Costello arrive à Macao pour retrouver la trace de ceux qui ont assassiné sa fille. Ce cuisinier de 50 ans a tout abandonné en France pour assouvir sa vengeance. Mais dans les bas-fonds de Macao, il manque de repères. Il décide alors d'engager trois malfrats qui connaissent bien la ville. Efficacement guidé, il parvient à se rapprocher de sa cible. Costello montre une aisance sans pareille lorsqu'il s'agit de faire parler les armes. Ses trois hommes de main comprennent alors qu'il cache un passé sanglant. Peu à peu, l'heure de la vengeance se rapproche. Mais Costello est frappé d'un mal qui pourrait bien l'empêcher d'atteindre son but...
Réalisation : Johnnie TO
Sortie en 2009
REPORT THIS ADCONFIDENTIALITÉ
Johnny a été programmé, façonné et réinventé pour répondre aux spécificités du personnage principal. En le privant de son droit à la parole, en le filmant comme un roi déchu, Johnnie To lui a permis de devenir lui-même.
L’amnésie se révèle la condition nécessaire pour permettre à Johnny de surmonter 47 ans de carrière au cinéma car le parcours de Johnny au cinéma ressemble à un chemin de croix.
Le personnage de Francis Costello fait référence à celui de Jeff Costello, le tueur solitaire interprété par Alain Delon dans Le Samouraï (1967), de Jean-Pierre Melville. Delon, qui est en Asie une vedette quasi divinisée en raison justement du film de Melville avec son atmosphère chevaleresque et sa fascination pour l’Orient, devait tenir à l’origine le rôle vedette de Vengeance. Mais après son refus, le nom de Johnny est arrivé, dont Johnnie To savait juste qu’il avait joué dans L’Homme du train et Détective, et ignorait tout du chanteur. Deux DVD des concerts de Johnny, Bercy et le Stade de France l’ont convaincu de sa présence sur scène. Puis la rencontre dans un restaurant parisien avec le chanteur tout de noir vêtu a emporté l’assentiment du réalisateur qui imaginait ainsi son personnage de Vengeance, « comme un soleil noir« , surgissant des ténèbres pour se retrouver dans la lumière. « Et puis, il y avait ces yeux », dira Johnnie To, « le regard de Johnny est l’un des plus étranges qu’il m’a été permis de croiser. Vous ne savez jamais ce qui se cache derrière ces yeux, vous devinez qu’ils expriment toute une série de blessures, de drames personnels, de traumatismes, sans savoir lesquels. J’ai su tout de suite qu’en filmant ces yeux j’aurais un film. Dites-moi, vous qui avez vu la plupart des films de Johnny au cinéma, quelqu’un s’était-il donné la peine auparavant de s’arrêter sur son regard ? ». Et Johnny est dans le film avec son un visage minéral au regard limpide, qui s’éclaire et s’efface à mesure qu’il joue la décrépitude hébétée.
Le noir de mise, le crucifix autour du cou, ses tatouages, … deviennent un style, celui d’un occidental perdu en Orient, le seigneur mêlé aux sans-grade du crime organisé, mais aussi l’élément incontrôlable, porteur d’une mélancolie qui révolutionne les codes d’un univers martial.
Melville, en 1970, filmait des hommes de son âge, déchus, abandonnés et condamnés à une solitude dérisoire. Il souhaitait confier à Johnny le rôle du détenu qui parvient à sauter du train et à s’enfuir pour terminer par hasard dans le coffre de la voiture d’un autre malfrat, Alain Delon. Ils avaient déjeuné ensemble à plusieurs reprises et la jeunesse du chanteur fascinait Melville. Sa mélancolie l’émouvait comme si quelque chose s’était prématurément fané chez lui. Le réalisateur avait décelé chez le rocker une profondeur insoupçonnable en regard des trois films qui n’avaient jusqu’alors que capitaliser sur l’idole.
Une scène frappante et criante de vérité, celle où il arrive sur une plage et joue avec des enfants, juste après sa parte de mémoire. Johnny Hallyday tenait à ce que ce ne soit pas seulement un film d’hommes. Il s’est conduit avec son réalisateur comme le chanteur avec ses paroliers : Sans les lâcher, se battant à la marge, conscient qu’« une syllabe, une virgule ou une intonation changent l’interprétation ». Et son metteur en scène a dû baisser les armes. « Je tenais tellement à me servir de ce que je vis aujourd’hui avec ma famille et l’insérer à l’écran. La solitude me fout la trouille, je ne voulais pas terminer seul, mais entouré de gamins. » (Johnny a cette solitude en horreur depuis qu’en février 1989 il a suivi à l’enterrement de son père « J’étais tout seul, j’ai suivi le corbillard, il n’y avait vraiment personne. C’est une chose qui m’a marqué« )
Certaines séquences valent vraiment le coup d’œil car d’une beauté visuelle inouïe comme :
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le passage où Costello est hagard sous la pluie, au milieu d’un océan de parapluies qui symbolise sa perte de repères
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